2666 - Démesure - Avignon IN - (07/07/16)
2666 est un roman colossal et labyrinthique. Le Chilien Roberto Bolaño n’eut pas le temps de le terminer tout à fait ; les cinq parties sont plutôt cinq romans différents dont les fils rouges se rejoignent assez mal. Au cœur, cependant, il y a l’histoire d’un mystérieux écrivain allemand, Achimboldi, sur lequel enquêtent des universitaires européens avant que l’action ne se transporte dans un Mexique tueur de femmes. Après le grand succès de la transposition des Particules élémentaires de Houellebecq, Julien Gosselin a eu les moyens de monter cette immense fresque qui défie les limites temporelles : le spectacle, avec ses entractes, dure 13 heures ! Le jeu vaut-il la chandelle ? Pas complètement. Gosselin a placé la barre haut, avec un décor d’Hubert Colas en perpétuel mouvement, des caméras qui proposent d’autres angles de vision, une troupe où l’on change sans cesse de rôle dans la volupté et la nervosité. Mais l’entreprise est démesurée. Il faudrait changer de style à chaque partie. L’un des chapitres est organisé comme une série de dépêches sur des viols et des meurtres projetées sur un tulle, qu’on lit pendant deux heures quinze ! Une autre se compose majoritairement de la diction du texte faite par une actrice, Caroline Mounier, en gros plan. Le spectacle s’épuise à tenir son pari impossible et, comme il est porté par une équipe de grand talent, il s’effondre avec les applaudissements que l’on doit aux braves.
Gilles Costaz
2666, d’après le roman de Roberto Bolaño (Folio Gallimard). Adaptation et mise en scène de Julien Gosselin, avec Frédéric Leigdens, Caroline Mounier, Adama Diop, Rémi Alexandre, Guillaume Bachelé.
La Fabrica, Avignon, jusqu’au 16 juillet, 04 90 14 14 14.
Reprise à l’Odéon-Théâtre de l’Europe en septembre.