Critique IN- La mastication des morts : Veillée au coin du cercueil

La Mastication des Morts fait partie de ces spectacles, rares, précieux, qui, sans que vous en ayez pleinement conscience sur le moment, vous déplacent profondément. Plus de vingt ans après sa création en 1999, cette pièce hors norme imaginée par le Groupe Merci réinvestit la Chartreuse de Villeneuve-Lez-Avignon, ou plutôt le cloître de son cimetière où, à la nuit tombée, se forme une curieuse procession.
 
A la manière de proches conviés à une veillée funéraire, les spectateurs sont invités à se pencher, à leur guise, au-dessus de multiples cercueils. Les y attendent ceux qui les ont précédés, ces défunts depuis trop longtemps enterrés, mais qui ont encore des messages à délivrer, des histoires de vie à ressasser, des douleurs à partager, des morts plus ou moins soudaines à exorciser. Chacun pourra écouter qui il le souhaite, mais devra accepter de ne pas pouvoir entendre l’ensemble de ces récits qui, entre confidences et moments choraux, tantôt durs, tantôt drôles, enchevêtrent la petite et la grande histoire. Intensément chamboulé au sortir, on se demande alors que sont nos morts devenus, et s’ils n’auraient pas encore, eux aussi, bien des choses à nous dire.
 
Vincent Bouquet

La Mastication des Morts, de Patrick Kermann, conception et mise en scène Joël Fesel et Solange Oswald (Groupe Merci), du 21 au 26/07, Festival d’Avignon, Chartreuse de Villeneuve-Lez-Avignon, 58 Rue de la République, 30400 Villeneuve-Lez-Avignon