Critique - Qui a peur de Virginia Woolf ? : C’est pt’être nous ! - Avignon Off - (05/07/19)

La pièce d’Edward Albee est affolante, étouffante, enivrante. La lecture que Panchika Velez nous en livre dans sa mise en scène est d’une épaisseur et d’une gravité terrible sous une apparente légèreté. Légèreté des êtres, un couple d’universitaires quinquagénaire – Frédérique Lazarini et Stéphane Fiévet – qui se livre à un jeu de la vérité cruel, voyeur et exhibitionniste devant un jeune couple – Agnès Miguras et  Aurélien Chaussade –, souffre-douleurs convoqués pour l’occasion. La noirceur du drame conjugal n’est qu’à un pas, et c’est l’alcool, véritable cinquième personnage de la pièce, qui le leur fera franchir. Whisky, bourbon, brandy s’emparent de ces personnages tour à tour victimes ou bourreaux, les laissent blessés au bord d’une scène d’hystérie à peine contenue avant de les faire repartir au combat. La peur est là, palpable, dans le regard de Frédérique Lazarini, étonnante Martha, et se pare de défi face à un Stéphane Fiévet jouant cruellement avec le feu à chaque instant de ce huis-clos. Epoux défié, il souffle le froid et le chaud avec un raffinement de jeu consommé. Agnès Miguras et Aurélien Chaussade sont ce couple piégé et enrôlé de force dans cette partie d’échec grandeur nature ; leur interprétation est aussi d’une grande justesse. Ce quatuor est équilibré, éreintant et éreinté. Dans une scénographie monumentale de bibliothèque circulaire, ils vivent un cauchemar enfiévré. Leurs secrets, leurs mensonges sont dévoilés, déballés. Impudiques et d’une théâtralité folle.

Avignon In Avignon Off  Acheter le magazine papier S'abonner à Théâtral