Critique In. Lieux communs – De la vérité incertaine

Baptiste Amann, qui se distingue par son talent d’auteur et metteur en scène d’histoires pour le théâtre, signe ici ce qu’il appelle un thriller théâtral : une pièce puzzle pour enquêter sur le viol et le meurtre d’une jeune femme survenu 10 ans plus tôt dans des circonstances pas totalement claires. D’ailleurs, l’homme qui a été jugé coupable, est devenu poète en prison et clame toujours son innocence. L’habilité de la mise en scène consiste à suivre quatre histoires sans liens apparents mais qui progressivement s’enchevêtrent pour faire jaillir (ou non) la vérité. 

Dans des plans-séquences presque cinématographiques, nous explorons différents lieux pas si communs : les coulisses d’un théâtre, le sous-sol d’un commissariat, un atelier de restauration et un studio de télévision. Le jeu de piste qui sous-tend le spectacle est en soi jubilatoire et rend la pièce haletante. Mais elle est ici alimentée par des questions plus profondes sur la représentation et la qualification de la vérité. On comprend que la vérité des uns n’est pas celle des autres, notamment parce que nos points de vue sont le résultat de vécus différents, de stéréotypes inconscients, de systèmes de pensée séculaires, de dispositifs d’assignation ou d’amalgames faciles. La vérité est-elle celle énoncée, est-elle autre, aurait-elle pu être autre ? Une pièce efficace par sa mécanique qui aborde de multiples sujets de société.
 
Enric Dausset
 

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