Critique In. Samson : pour le son - (12/07/21)
Le metteur en scène sud-africain Brett Bailey a voulu resituer l’histoire de Samson, héros de l’Ancien Testament (Livre des Juges), dans un contexte culturel bien différent de celui de l’histoire du peuple Hébreux. Se saisissant de la figure mythique de cet homme voué à Dieu depuis l’enfance s’il respecte le vœux de naziréat – celui de ne pas se couper cheveux en signe de consécration totale et afin conserver sa puissante force – il le transpose dans le contexte postcolonial de son pays, le confronte aux notions de capitalisme et de xénophobie. Finalement, il ne conserve que le thème de la chevelure, de la trahison et de la vengeance, et convoque les puissantes transes shamaniques africaines qu’il fait exécuter par un artiste danseur, Elvis Sibeko, lui même guérisseur traditionnel sud-africain. La danse rituelle qu’il exécute est donc – autant que faire se peut sur une scène d’Avignon – authentique. Pour le spectateur peu documenté ou peu habitué à cette esthétique, le rite de cette liturgie demeure assez hermétique. La musique jouée et chantée en live est en revanche magnifique, elle nous transporte. Au sublime de cette exécution musicale et vocale s’ajoute l’exécution prenante du fameux grand air Mon cœur s’ouvre à ta voix de Camille Saint-Saëns dans l’opéra Samson et Dalila. Une recomposition donc du récit biblique sur fond d’un élégant mur vidéo animé de dessins plutôt naïfs. Les colonnes du palais que Samson détruira y ont des allures de Twin Tower new-yorkaises. Le symbole géopolitique est assumé.
François Varlin
Samson, texte et mise en scène Brett Bailey, chorégraphie Elvis Sibeko, avec Shane Cooper, Mikhaela Kruger, Mvakalisi Madotyeni, Zimbini Makwethu, Marlo Minnaar, Hlengiwe Mkhwanazi, Apollo Ntshoko, Elvis Sibeko, Jonno Sweetman, Abey Xakwe
Spectacle en Anglais, Xhosa et Zoulou
Avignon, Gymnase du lycée Aubanel – 14 rue Palapharnerie, 04 90 14 14 14, les 12 et 13 juillet à 18h
Photo : Samson © Nicky Newman