Critique Off. La Métamorphose des cigognes : sperme en berne
- (7/07/21)
- (7/07/21)
Les cigognes ont bien changé. Et les choux aussi, tant la façon de faire les enfants qui nous est décrite dans ce solo en scène est imprévue, même si bien connue depuis les premières fécondations in vitro annoncées des années 78. Dans la petite "pièce de recueil" paradoxalement inhospitalière de l’hôpital, un futur père s’apprête à donner son sperme à un gobelet blanc. Ailleurs, dans un autre service, le prélèvement des ovocytes de sa compagne est en cours. C’est sur ce geste cocréateur déconnecté du double orgasme que s’arrête ce jeune homme. Et arrêter est bien le mot puisqu’il ressent un véritable blocage au moment de s’exécuter, entre la pression d’un infirmier importun, les souvenirs qui l’assaillent, et le protocole établi du genre lavage des mains-pipi-zizi. Une angoisse.
Marc Arnaud possède son rôle et son sujet qu’il a écrit lui-même. Remarquablement, il confère une heure durant sur son désarroi devant cette façon de donner la vie. Ejaculer n’aura jamais été si compliqué. De désopilantes digressions certes, mais aussi un réalisme et une réflexion sous-jacente intéressante sur la paternité et le désir d’enfant, au fil d’un texte ramassé, rythmé, adressé au public. Peu à peu, le spectateur entre dans le cœur du sujet et la tête du patient dont le moral est en berne, et pas que. Il en devient attachant.
Incontestablement la performance de théâtre est accomplie, belle et précise, dépouillée de tout artifice par une mise en scène sans vulgarité.
François Varlin
La Métamorphose des cigognes, de et avec Marc Arnaud, mise en scène Benjamin Guillard.
Avignon, Théâtre du Train bleu, 40 Rue Paul Sain, 04 90 82 39 06, du 7 au 26 juillet, à 13h50
www.theatredutrainbleu.fr
Photo : La Métamorphose des cigognes © Dr