D comme Deleuze, Cédric Orain philosophe au théâtre de l'Echangeur - (23/10/17)
Pour Cédric Orain, pas besoin d’être philosophe pour comprendre Deleuze. Son spectacle, D comme Deleuze, s’inspire de l’interview sous forme d’abécédaire donnée par le philosophe en 1988 et diffusée en 1995 juste avant son suicide. Le metteur en scène en a extrait les concepts qui parlent de création et les a mis en mouvement dans une conférence joyeuse.
Théâtral magazine : De quoi parle l'interview sous forme d’abécédaire de Gilles Deleuze ?
Cédric Orain : C’est une interview filmée qui dure huit heures puisqu'il parcourt tout l'alphabet et dans laquelle il traverse à la fois des éléments forts de son œuvre mais aussi des éléments intimes. Il parle sans aucune langue de bois, d’une voix qui a beaucoup de souffle à cause de la tuberculose. On ne cherche pas à l’imiter. Comme il rend accessible sa pensée, on a essayé de la rendre charnelle. On a décortiqué les concepts dont il est question à chaque lettre de l’alphabet, puis on a écrit des impros et des scènes. Sur scène, il y a un conférencier et autour de lui, un acrobate et un chanteur.
Théâtral magazine : De quoi parle l'interview sous forme d’abécédaire de Gilles Deleuze ?
Cédric Orain : C’est une interview filmée qui dure huit heures puisqu'il parcourt tout l'alphabet et dans laquelle il traverse à la fois des éléments forts de son œuvre mais aussi des éléments intimes. Il parle sans aucune langue de bois, d’une voix qui a beaucoup de souffle à cause de la tuberculose. On ne cherche pas à l’imiter. Comme il rend accessible sa pensée, on a essayé de la rendre charnelle. On a décortiqué les concepts dont il est question à chaque lettre de l’alphabet, puis on a écrit des impros et des scènes. Sur scène, il y a un conférencier et autour de lui, un acrobate et un chanteur.
Quels concepts avez-vous retenus ?
Ceux qui parlent de création. Le concept "devenir animal", par exemple, ne signifie pas devenir un animal mais être en résonance. Sur le plateau, on peut faire des tentatives pour s'en approcher par le mouvement ou le chant. Quand le concept prend chair, le spectateur reçoit une pensée sans paroles. Pareil avec "différence et répétition". Qu'est-ce que c'est que la différence dans la répétition ? Qu'est-ce qu'il y a de nouveau, qu'est-ce qui se crée ? Il n'y a pas besoin de parler, le corps ou le chant suffisent à répondre. Il parle aussi du lien mystérieux entre les actes de création et de résistance. Est-ce que les gens qui créent sont des résistants ? On peut se poser la question. Est-ce que les gens qui résistent sont forcément des créateurs ? Tout dépend si on doit résister à la vie ou au monde extérieur…
Est-ce drôle ?
Oui c'est drôle. Mais Deleuze est très drôle. Quand il dit qu'il ne supporte pas les colocs, qu'il hait la culture, il le fait avec une espèce de bouffonnerie excessive et on a essayé de garder cet humour. Le public n'a pas besoin d'être concentré ni d’avoir jamais ouvert un livre de philo. Il faut juste qu’il ait envie de s'amuser un peu avec de la pensée.
Et qu’est-ce qu’il apprend en voyant ce spectacle ?
Que finalement il faut résister à la pression de l’image. En tant qu’artiste, je subis beaucoup cette pression là : il ne faut pas que la pensée soit trop complexe, que le langage soit trop poétique, il faut rester dans des choses simples et accessibles. Eh bien non, je fais une proposition joyeuse sur une pensée complexe. Parce que recevoir une pensée complexe c'est une libération.
Ceux qui parlent de création. Le concept "devenir animal", par exemple, ne signifie pas devenir un animal mais être en résonance. Sur le plateau, on peut faire des tentatives pour s'en approcher par le mouvement ou le chant. Quand le concept prend chair, le spectateur reçoit une pensée sans paroles. Pareil avec "différence et répétition". Qu'est-ce que c'est que la différence dans la répétition ? Qu'est-ce qu'il y a de nouveau, qu'est-ce qui se crée ? Il n'y a pas besoin de parler, le corps ou le chant suffisent à répondre. Il parle aussi du lien mystérieux entre les actes de création et de résistance. Est-ce que les gens qui créent sont des résistants ? On peut se poser la question. Est-ce que les gens qui résistent sont forcément des créateurs ? Tout dépend si on doit résister à la vie ou au monde extérieur…
Est-ce drôle ?
Oui c'est drôle. Mais Deleuze est très drôle. Quand il dit qu'il ne supporte pas les colocs, qu'il hait la culture, il le fait avec une espèce de bouffonnerie excessive et on a essayé de garder cet humour. Le public n'a pas besoin d'être concentré ni d’avoir jamais ouvert un livre de philo. Il faut juste qu’il ait envie de s'amuser un peu avec de la pensée.
Et qu’est-ce qu’il apprend en voyant ce spectacle ?
Que finalement il faut résister à la pression de l’image. En tant qu’artiste, je subis beaucoup cette pression là : il ne faut pas que la pensée soit trop complexe, que le langage soit trop poétique, il faut rester dans des choses simples et accessibles. Eh bien non, je fais une proposition joyeuse sur une pensée complexe. Parce que recevoir une pensée complexe c'est une libération.
Propos recueillis par Hélène Chevrier
D comme Deleuze, autour de l’œuvre de Gilles Deleuze, mise en scène Cédric Orain, avec Olav Benestvedt, Guillaume Clayssen et Erwan HaKyoon Larcher
L’Echangeur, 59 avenue du Général de Gaulle 93170 Bagnolet, 01 43 62 71 20
L’Echangeur, 59 avenue du Général de Gaulle 93170 Bagnolet, 01 43 62 71 20
jusqu’au 9/11
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