Critique Off.  Le Discours : troublé, obsessionnel et compulsif - (22/07/21)

Ce quadragénaire qui cogite à s’en arracher les cheveux ressemble à beaucoup d’entre nous. Parce que sa copine l’a quitté, il est dans un état second ; sous pression. Il a bien tenté de lui envoyer un SMS, il sait qu’elle l’a lu. A table chez ses parents, il ne pense plus qu’à la réponse qu’elle lui fera, lorsqu’entre deux plats son futur beau-frère lui demande de composer un discours pour le jour de son mariage... La famille lui remonte alors à la gorge, comme une nausée !
Ce solo théâtral adapté du roman de Fabcaro est une réussite en tous points. Très bien construit, drôle, émouvant, il convoque dans le schéma mental du personnage tout ce qui nous hante et nous habite. La sacro-sainte famille, les déceptions de la vie, les relations affectives... Il y a ce qu’il voudrait dire, ce qu’il peut dire, et ce qu’on lui demande de dire. Un discours justement. Autant lâcher une bombe dans la noce ! Lorsque votre vie ne tient plus qu’à un SMS, on est capable de tout. Benjamin Guillard est un interprète fervent, adroit à distiller la pensée et les sentiments de son personnage. Sa présence scénique est forte, son jeu abouti, son traitement du second degré exemplaire. Tournant autour d’une table de salle à manger, il ouvre les passages dérobés, les doubles fonds que ce repas de famille tend vers lui, juge les autres et subit leur jugement. Obsédé par un SMS qui n’arrive pas, il vagabonde entre cohérence et absurdités, entre petites joies et grandes déceptions. Par intermittence s’affichent en vidéo des SMS, une horloge, des photos, les tubes musicaux ponctuent le monologue. Un spectacle purement jouissif !
François Varlin


Le Discours, d’après le roman de Fabrice Caro, adaptation et mise en scène Emmanuel Noblet, adaptation et jeu Benjamin Guillard
Théâtre des 3 Soleils, 4 rue Buffon 84000, 04 90 88 27 33, du 7 au 31 juillet à 16h55 - Relâches : 12, 19, 26 juillet